Une coupe de glace ? [Charly A. Remen] & [Elryn Thomas] Privé

C'est vrai que maintenant qu'elle y pense, Thomas ne lui allait pas très bien en tant que prénom, généralement, quand quelqu'un se présente avec son prénom natal, il le porte très bien, de ce fait-là, elle a pu conclure que nombreux étaient les Dylan blonds et les Cassandra brunes. Ce ne sont que des préjugés, certes, mais à plusieurs reprises ils s'étaient avérés plutôt vrais. Dans ce cas-ci, si Elryn s'appelait Thomas, il aurait dû avoir le visage plus bouffi, plus rond, peut-être avec des tâches de rousseurs en option ? Ce qui est sûr, c'est qu'il devait y avoir un lien avec la tomate, la tomate est ronde, le visage doit être, par conséquent, rond ! Quant au Elryn, il sonnait beaucoup mieux, n'ayant jamais entendu ce prénom auparavant, Charly se demanda s'il avait été inventé rien que pour le résineux ou si c'était un nom étranger... Bien que le Thomas, lui, était assez commun dans les pays francophones... Après tout, les résineux ont la belle particularité de posséder un prénom inventé, fait sur-mesure, qui ne va qu'à eux.

Quoiqu'il en soit, quelque chose avait changé soudainement, Charly n'aurait pu dire si cela venait de l'ambiance ou directement d'Elryn, mais elle fût étonnée à quel point il paraissait soudainement... Humain. Elle eut alors une légère frustration qui la fit tressaillir. Les résineux seraient-ils capables de ressentir toutes les émotions humaines ? Serait-il capable d'aimer ? Que diable y avait-il à l'intérieur de lui ! Des câbles électriques ou bien des fibres vivantes... C'était à creuser, il faudra qu'elle mène l'enquête.

Elle aurait pu lui demander, mais elle n'osa pas, et il était hors de question de montrer qu'elle s'intéressait à ces choses-là ! Elle se racrapota sur elle-même en s'efforçant de penser : « Des machines ! Des machines ! Elles nous ressemblent mais si ça se trouve, elles ne font que nous imiter ! » Elle se tira les joues, honteuse de ce qu'elle venait de penser quelques minutes auparavant. Mais aussitôt, comme si le résineux venait de lire dans ses pensées, il jura qu'il était comme elle, comme les vrais vivants, même s'il n'était pas humain. Il lui tendit la main mais il heurta la coupelle qui répandit le liquide verdâtre sur la table. Alors il s'excusa et se mit à tout nettoyer. Charly ne savait pas trop quoi penser, si elle devait avoir pitié, être gênée, triste, fâchée, joyeuse... Elle voulut lui crier la vérité en face, enfin plutôt, son point de vue à elle, du fait qu'il n'était pas humain, qu'il ne devait alors, ni se croire humain, ni faire comme les humains. Mais alors qu'elle allait ouvrir la bouche, de grosses larmes tombèrent sur la table. D'où venaient-elles ? Quand même pas de lui ?! La petite rousse n'osa pas lever les yeux pour regarder, si c'était lui qui pleurait, toutes ses hypothèses seraient anéanties, si ce n'était pas lui...

Oh crap ! Elle leva la tête et vit, pour la toute première fois de sa vie, un résineux pleurer. Elle en avait déjà vu quelques uns se faire mal et pleurnicher, d'autres exprimer certaines expressions déconcertantes, mais jamais elle n'en avait repérer un expulser des larmes de tristesses. Départagée entre la fascination d'autant de réalisme et le dégoût envers elle d'avoir pensé de telles choses à propos de ces pantins, la rouquine était restée plantée là, comme figée, ne faisant qu'observer la scène, ne sachant pas trop quoi faire ou dire.

Ayant complètement oublié son asthme, c'était le moment rêvé pour sa maladie de se déclencher, tant d'émotions exprimées d'un coup, le stress, l'accélération de la respiration... Tout ça engendra une irritation et Charly eut l'impression que quelque chose lui écrasait la poitrine et lui coupait le souffle et qu'on lui mit un sac plastique sur la tête. Complètement paniquée, elle en oublia où se trouvait son inhalateur qui devrait être dans son sac. Le souffle manquant, elle se mit à halluciner des fantômes qui l'étranglaient et, machinalement, elle voulut se défendre en envoyant un coup de poing qui se retrouva malheureusement sur la tête à Elryn... Heureusement que Charly ne fait pas plus de 35 kg huhuh.

Après s'être finalement jetée sur son sac, se débattant avec les serpents qui lui obstruaient le poumon elle s'empressa d'envoyer le paquet de médoc pour exterminer tous ces parasites. Calmant sa toux, lui dégageant la gorge, lui purifiant les poumons, elle pu sentit l'air lui revenir. Elle resta encore un petit moment à genoux, face à son sac, en humant profondément l'air avant de se tourner vers Elryn.

Constatant les dégâts dont elle ne fût, apparemment, pas la seule à en avoir été victime, s'attendant alors à une seconde crise probable, muette comme elle le put , elle ré-appuya sur l'inhalateur, appréhendant déjà la suite de la scène... Si elle ne s'excusait pas tout de suite, se pourrait-il qu'Elryn serait alors plus humain qu'elle ? Cette pensée fit comme le même effet que la foudre s'abattant sur elle. Et si elle s'excusait... ?

Encore sous le choc, de ces larmes, de sa crise et de cette nouvelle hypothèse, Charly vaqua dans un autre monde pleines de questions sans aucune réponse. Elle était comme paralysée, un corps sans plus aucun esprit pour le dicter, celui-ci trop occupé à se morfondre sur la réelle nature des résineux.

Tiens, les lumières se sont éteintes ! Ce qui eut un effet simultané sur les deux petits, Charly oublia qu'elle avait posé une question et Elryn oublia d'y répondre car derrière, tout s'éteignait. Normalement, c'est rare de rester coincé dans un magasin, ils vérifient quand même... Enfin, si le patron de ce restaurant est un résineux, ça ne l'étonnerait pas vraiment, en tout cas, elle restait optimiste, im-pos-si-ble qu'on l'ait oublié, elle , Charly Andréa Remen, dans un Candy Store ! Bien que sa tenue n'est pas assez contrastée avec le décor tout coloré, elle ne passe tout de même aussi inaperçue pour qu'on l'oublie, qui plus est, avec un résineux !

Enfin... Ce n'était pas vraiment le fait de rester coincée avec un résineux qui l'inquiétait, ça aurait pût être n'importe qui -quelqu'un assez reposé tout de même-, ça ne la gênerait pas, c'est le petit " Jusqu'à demain matin " qui la mit mal à l'aise. N'ajoutant aucun mot, comme seule réponse, un p'tit coup de produit anti-crise-asthmatique de la part de l'inhalateur et un trèèès long soupir. Rester calme, ce n'est qu'un magasin de bonbon, coloré, et il y a pleins de coussins partout pour passer la nuit ! Il n'y a vraiment pas de quoi paniquer ! Mais plus elle réfléchissait à la situation, plus son cœur battait vite car, le vrai, le terrible, l'abominable problème, à y penser maintenant, ce n'était ni le résineux, ni les lumières éteintes, ni le fait de devoir camper dans un magasin, le vrai problème, c'était la surveillante des dortoirs ! Qu'est-ce qu'elle va dire si elle apprend que deux élèves se sont absentés cette nuit ? Il est strictement interdit de sortir après les couvres-feux ! Ils vont certainement les rechercher car ce ne sont pas le genre de gosses à sortir la nuit, peut-être qu'ils penseront qu'ils se seront fait kidnappés ! Dans Emonalis ? Mais n'importe quoi ! Quoiqu'il en soit, ils se mettraient à les rechercher, ou pas, et s'ils les découvrent dans un magasin de bonbon ? Et si au contraire ils ne les découvraient pas ?! Ah ! Le pire est à prévoir !

D'un bond, Charly se retrouva à côté d'Elryn, scrutant l'énorme paille-ascenseur, le secoua légèrement pour constater qu'il était moins solide qu'il en avait l'air... Mais, la barbapaterie fait quelle taille au fait ? De dehors, elle paraît petite, mais rien que le rez-de-chaussée est immense ! Il y a encore tant de pièces à visiter et il doit sûrement et certainement y avoir une sortie de secours, voir plusieurs ! Si les résineux sont préventifs. La petite rousse rebroussa chemin et essaya les portes une à une jusqu'à en trouver une ouverte. Celle-ci ouvrait sur un long escalier tournant, sans rampes, et qui vibrait dès qu'on y posait le pied. La couleur cramoisie et la texture transparente en disait long sur le matériau utilisé pour celui-ci... De la gélatine ! Charly se retourna et fit signe à Elryn de venir avec le réflexe de murmurer, oubliant que le magasin était fermé et, par conséquent, vide de toute âme susceptible de les surprendre !

D'un geste craintif, elle posa son pied sur la première marche, constatant avec dégoût que celui-ci était similaire à une limace géante. Elle posa le second pied et avança lentement, à quatre pattes, prenant bien soin de ne pas perforer la friandise... Au moins, une chose est sûre, c'est qu'ils ne risquaient pas de mourir de faim ici ! Enfin, ils pourraient tout aussi mourir d'indigestion... Brrr, ce serait répugnant... Mais alors que Charly divaguait sur la manière dont ils pourraient mourir, elle avait, par mégarde, posé ses deux pieds au même endroit, ce qui déséquilibra la répartition de son poids qui perfora l'escalier, faisant un gros trou. Les marches de gelée suivantes la réceptionnèrent tels un trampoline, ce qui n'eut aucun impact grave en somme, si ce n'est que le cerveau secoué, à l'envers. Hmm, charmant ! Il n'y avait plus qu'à espérer qu'Elryn ne fasse pas la même gaffe qu'elle où ils seraient plutôt mal.